Collectif Éthique sur l’étiquette

Le coût du RESPECT selon Zara

Communiqué de presse - 20 novembre 2019

Zara, marque phare du groupe espagnol Inditex et leader mondial de la fast fashion, a vu son chiffre d’affaires multiplié par 5 en moins de 20 ans, pour atteindre 26 milliards d’euros. Elle doit son succès à un modèle unique, qui place la rentabilité au coeur d’un système fortement intégré, mais qui repose également sur sa capacité à capter la grande majorité de la valeur de ses produits, au détriment du droit fondamental des ouvrier.ère.s de sa chaîne d’approvisionnement à un salaire vital, comme décrypté dans notre nouvelle étude « Le coût du respect selon Zara ».

L’enseigne de fast fashion est singulière à plusieurs titres :

  • elle a poussé à l’extrême l’incitation à l’achat permanent en étant capable, en quelques semaines seulement, de concevoir, fabriquer et offrir à la vente un produit ;
  • son modèle est de loin le plus prospère : il permet à son fondateur, Armancio Ortega, de trôner au rang de 6ème homme le plus riche de la planète, détenant une fortune de près de 63 milliards d’euros ;
  • elle est relativement discrète : son succès est tel qu’elle peut quasiment se passer de publicité directe, qui l’affranchit, pense-t-elle, d’un discours sur sa responsabilité à prévenir les impacts sociaux et environnementaux de son modèle.

Ce dernier est pourtant loin d’être plus vertueux : contrairement à sa communication, Zara, comme les autres enseignes du secteur, puise largement l’efficacité de son modèle dans la main d’œuvre sous-payée qui fabrique ses produits en Turquie, en Inde ou au Bangladesh, en dépit des profits colossaux que génèrent l’enseigne et sa maison-mère.

Face à l’opacité entretenue par la marque, le Collectif Ethique sur l’étiquette et ses alliés, Public Eye en Suisse et Schöne Kleren Campagne aux Pays-Bas, membres du réseau Clean Clothes Campaign, ont analysé la répartition réelle de la valeur d’un produit phare, un sweatshirt noir floqué « R-E-S-P-E-C-T ». L’étude, confiée au BASIC (Bureau d’analyse sociétale pour une information citoyenne) fait un constat sans appel : son modèle économique fortement intégré et ultra réactif lui permet d’une part de s’ajuster au succès de ses produits et de les renouveler en un temps record ; d’autre part, les salariés de sa chaîne d’approvisionnement gagnent la part congrue. Résultat : l’enseigne capte 90% des bénéfices générés par les différents acteurs de la chaîne. A l’autre bout de la chaîne, les salariés turcs de la confection ont gagné en moyenne 430 euros par mois. Il leur en faudrait près de 3 fois plus pour atteindre un salaire vital. Le respect, pour Zara, ne se conjugue apparemment qu’en surface.

En contrepoint de ce modèle qui ignore les droits des travailleur.euse.s, les organisations proposent une répartition de la valeur qui prend en compte le versement d’un salaire vital à l’ensemble des salariés de la chaîne d’approvisionnement. Ainsi, selon nos estimations, pour chaque sweatshirt vendu à un prix moyen de 26,70 € :

  • Zara gagne 4,20 €, soit deux fois plus environ que l’ensemble des travailleur.euse.s de sa chaîne d’approvisionnement (2,08 €)
  • Il faudrait 3,62 € de plus par article pour garantir un salaire vital à l’ensemble des travailleur.euse.s

Le groupe Inditex, qui affichait en 2018 un bénéfice record de 3,4 milliards d’euros, a largement les moyens d’absorber ce coût qui devrait être incompressible, en acceptant une redistribution de la valeur, qui doit la conduire au final à transformer son modèle économique.

Alors que la fast fashion a décuplé les impacts sociaux et environnementaux du secteur de la mode, il est temps de faire évoluer le modèle économique des grandes enseignes centré vers la conquête du profit sans égard aux impacts générés, par le biais de règles contraignantes. Notamment, en étendant la loi française sur le devoir de vigilance à l’ensemble des sociétés commerciales, afin d’y inclure des entreprises comme Zara France, à ce jour exempte de cette obligation.

Les multinationales doivent elles-mêmes cesser les pratiques ignorant les droits fondamentaux des travailleur.euse.s à gagner de quoi vivre dignement.

CONTACT PRESSE  : Nayla Ajaltouni – n.ajaltouni@ethique-sur-etiquette.org